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7e article

L’importance du registre
de Rivière-Saint-Jean

Éric Kavanagh

Le 23 mai 2025

Généalogie, Longue-Pointe, Rivière-Saint-Jean, Minganie, registres paroissiaux et civils, baptêmes, mariages, sépultures, Amédée Gagnon.

S’intéresser à l’histoire et à la généalogie de Longue-Pointe, c’est obligatoirement porter une attention centrale à la source documentaire de première importance qu’est le registre paroissial de Rivière-Saint-Jean. Avant d’en dire quelques mots, discutons d’abord des registres paroissiaux en général, notamment en Nouvelle-France.

Une invention religieuse

Un registre paroissial, c’est un livre manuscrit tenu par le curé de la paroisse dans lequel étaient consignés avec soin tous les événements majeurs de la vie des paroissiens : baptêmes, mariages et sépultures. Avant que l’état civil ne prenne le relais (en 1994 au Québec), c’était le principal document officiel pour enregistrer ces moments-clés. Chaque page, chaque ligne, conserve les traces écrites des noms, des dates, des lieux et des liens familiaux, formant une mémoire vivante et tangible des communautés d’autrefois. Pour les généalogistes, ces vieux livres de paroisse sont des trésors d’encre et de papier (Figure 1).

Figure 1

Prêtre remplissant son registre paroissial

© Éric Kavanagh, 2025

Prêtre remplissant son registre paroissial

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Réalisé à l’aide de ChatGPT (version 4.O) le 31 mars 2025.

L’existence et la tenue des registres paroissiaux sont liées à un impératif généalogique au cœur de plusieurs religions.

Les règles de droit observées par certaines religions exigent de leurs fidèles une connaissance généalogique. C’est le cas, en particulier, de l’Église catholique et des Mormons.

(JETTÉ 1991 : 205)

Évidemment, nos registres paroissiaux, ouverts et tenus par les gens d’église pendant de nombreux siècles, sont liés à la catholicité et – après la Conquête anglaise complétée en 1763 – au protestantisme. Mais une autre religion a joué et joue toujours un rôle de première importance pour tous les généalogistes de la planète : l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, dont les membres sont surtout connus sous l’appelation Mormons (DE MORANT 2020).

Les saints des derniers jours [les Mormons] considèrent que leur première obligation est d’accomplir, par procuration, les ordonnances du temple pour les membres décédés de leur famille afin de leur permettre de recevoir les bénédictions de l’Évangile. Les saints des derniers jours croient que ces ordonnances scellent ou lient les familles ensemble, l’objectif étant une chaîne ininterrompue jusqu’à Adam. Cette volonté a motivé [...] la recherche d’actes anciens, notamment grâce à la technologie du microfilm leur permettant de sauvegarder leur généalogie. Son site web FamilySearch [Web], dont les ressources sont gratuitement disponibles au public, est l’un des sites généalogiques les plus utilisés sur Internet.

(WIKIPÉDIA 2025 : s. v. Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours [Web])

Outre les besoins spécifiques de la religion mormone (fondée en 1830 dans l’État de New York), ceux de la religion catholique avaient davantage à voir avec les interdits de mariage entre parents ou gens apparentés.

C’est par l’intermédiaire des règles régissant les empêchements et les dispenses de parenté au mariage que l’Église Catholique a attribué à la connaissance généalogique un rôle essentiel. Au Xe siècle, par exemple, époque où la prohibition du mariage entre apparentés s’étendait jusqu’au septième degré canonique, le Synode d’Ingelheim [en juin de l’an 948] exhortait les fidèles à rédiger la liste de leurs ancêtres afin d’éviter de contracter par ignorance une union illicite. À défaut d’écrits ayant subsisté jusqu’à nos jours, cette prise de position de l’Église a développé, au moins dans l’élite, une sensibilité non équivoque à la connaissance de la parenté cognatique [autant du côté des hommes que des femmes]. Cette volonté de contrôler les mariages entre apparentés a d’ailleurs conduit à l’invention, au XVIe siècle, des registres paroissiaux, outil majeur de la recherche généalogique depuis lors.

(JETTÉ 1991 : 205)

Les registres en Nouvelle-France

Pour caractériser le Québec, on parle souvent de grands succès internationaux comme ceux du Cirque du Soleil, de Céline Dion – et avec raison ! –, mais on ignore à quel point la généalogie québécoise est également exceptionnelle. Très peu de sociétés dans le monde peuvent compter sur un tel état de constitution et de préservation de leurs registres, quand ces derniers existent, bien sûr.

La continuité et la qualité des registres paroissiaux québécois sont uniques dans le monde. Les actes de baptême, mariage et sépulture rédigés par les autorités ecclésiastiques depuis les débuts de la Nouvelle-France ont traversé le temps sans trop de lacunes. [...] Entre 1621 et 1800, les curés des 159 paroisses du Québec ont enregistré 690 000 actes de catholicité qui constituaient l’état civil officiel du pays. Il faut ajouter à ces données quelques milliers d’actes des paroisses protestantes ouvertes au culte à compter de 1763. Entre 1800 et 1900, sept millions d’actes ont été rédigés par rapport à plus de 17 millions pour la période de 1901 à 2000. Les archives québécoises détiennent près de 25 millions d’actes concernant les Québécois depuis quatre siècles [et ce nombre est très certainement dépassé aujourd’hui, en 2025, 16 ans après la publication de l’ouvrage que je cite.].

(FOURNIER 2009 : 77, 81)

Nous tenons registres depuis l’origine de la Nouvelle-France laurentienne (à Québec), et ce, sans interruption ni grande perte. Et comme ces documents ont été produits dans le contexte d’une administration civile et ecclésiastique française, les textes rédigés étaient assez détaillés et systématisés.

L’institution des registres paroissiaux fit partie intégrante de l’implantation de la civilisation française en Nouvelle-France au début du XVIIe siècle. Le premier registre paroissial fut probablement ouvert à Québec dès 1616 (le plus ancien acte conservé date de 1621), soit un an après l’arrivée des premiers missionnaires, les Récollets, et un an avant l’arrivée de la première famille, celle de Louis Hébert [Web]. Par la suite, l’ouverture de registres paroissiaux accompagne fidèlement la fondation des établissements: Trois-Rivières en 1634, Sillery en 1638, Montréal en 1642, et ainsi de suite.

(JETTÉ 1991 : 432)

Il faut attendre jusqu’en 1621 pour voir l’ouverture du premier registre en Nouvelle-France. En s’établissant au Canada, les Français ont implanté, en plus des us et coutumes de leur province d’origine, les lois et ordonnances royales en vigueur en France. L’acte le plus ancien est le baptême d’Eustache Martin, célébré à Québec le 24 octobre 1621.

(FOURNIER 2009 : 79)

Voici l’acte de baptême d’Eustache Martin, le premier consigné au registre de la paroisse Notre-Dame à Québec, en octobre 1621, donc le plus ancien de Nouvelle-France dont nous avons encore la trace (Figure 2). Eustache est le fils d’Abraham Martin, ce même Abraham qui a donné son prénom à la côte du même nom à Québec (Côte d’Abraham [Web]) ainsi qu’aux grandes plaines bien connues (Plaines d’Abraham [Web]).

Figure 2

Premier acte de Nouvelle-France (1621)

Family Search, Registres paroissiaux catholiques (Canada, Québec), Notre-Dame-de-Québec, 1621

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« Le 24 octobre 1621 le père[?] Denis Recollet faisant fonctions de curé à Québec baptisa Eustache fils d’Abraham Martin dit l’Écossois, et de Marguerite Langlois. M. Eustache Boullay fut parrain. Et Guillemette Hébert épouse de Guillaume Couillard fut marraine. »

Note. Cet acte de baptême contient le nom de personnages très importants de la Nouvelle-France :
- Denis Jamet, premier supérieur de la mission des Récollets en Nouvelle-France [Web]
- Abraham Martin dit l’Écossais, parmi les premiers habitants de Nouvelle-France [Web]
- Marguerite Langlois, première sage-femme de Nouvelle-France [Web]
- Eustache Boullé, beau-frère et lieutenant de Samuel de Champlain [Web]
- Guillemette Hébert, fille de la première famille de la Nouvelle-France [Web]
- Guillaume Couillard, patriarche d’une des plus importantes lignées généalogiques du Québec [Web]
- Eustache Martin [Web].

Note de généalogie paspaya. Le nom de famille Martin présent à Longue-Pointe (pensons ici à Yvonne Martin, épouse de Stewart Burgess) a des origines différentes.

Le contenu des actes

Avant que l’État ne prenne en charge l’enregistrement des naissances, mariages et décès, ce rôle appartenait aux paroisses. Ces registres constituent la mémoire écrite des familles et, pour les généalogistes, des documents de première importance dans la quête des origines.

Dans les sociétés occidentales, l’enregistrement des personnes est fait par l’État, qui réglemente la tenue des registres de la population. Depuis des siècles, les registres civils, et avant eux les registres paroissiaux, permettent aux généalogistes de remonter leur ascendance en raison des mentions nominatives contenues dans les actes de baptême, de mariage et de sépulture. Les registres peuvent être consultés par les généalogistes dans le respect de la réglementation concernant la communicabilité des actes civils ou religieux.

(FOURNIER 2009 : 77)

Au-delà des dates et des noms, les actes d’état civil dévoilent des fragments de vie. Ils permettent de reconstituer les liens familiaux, les parcours individuels et parfois même de deviner le quotidien des gens d’autrefois. Le passage suivant précise les éléments essentiels que contiennent ces documents clés pour toute recherche généalogique.

Un acte d’état civil contient des informations nominatives qui permettent d’établir la filiation d’un individu. Le prénom, le patronyme, le surnom du sujet de l’acte ainsi que les noms de ses parents ou de son conjoint doivent apparaître dans les actes. Il peut aussi contenir des informations telles que le sexe, la résidence, la profession, etc. Enfin, l’acte doit mentionner le nom du rédacteur, la date et le lieu de la rédaction.

(FOURNIER 2009 : 77)

La fin du 20e siècle marque un changement majeur dans la manière dont le Québec enregistre les événements de la vie. L’État reprend entièrement le rôle autrefois assumé par les institutions religieuses, officialisant ainsi un registre unique, civil et laïc.

En 1994, le gouvernement met en place un état civil moderne, crée un poste de Directeur de l’état civil [Web] et dote le Québec d’un registre unique non confessionnel. La nouvelle réglementation retire aux églises l’enregistrement légal des actes de naissance, mariage et décès, ceux-ci relevant maintenant de l’État. Bien que la nouvelle réglementation soit d’ordre civil, les prêtres et les ministres desservant les églises sont toujours considérés comme des officiers de l’état civil pour la célébration des mariages. [...] Les actes de naissance ont remplacé les actes de baptême et les actes de sépulture sont maintenant des actes de décès.

(FOURNIER 2009 : 81, 83)

Jusqu’à la réforme de 1994, les actes de naissance, mariage et décès étaient enregistrés par les paroisses, où les prêtres jouaient le rôle d’officiers de l’état civil. Pour chaque événement, deux versions du registre étaient produites : l’original, conservé à la paroisse, et une copie transmise au greffe du district judiciaire régional.

Les registres originaux, dits « religieux », se distinguent par la présence d’annotations marginales ajoutées au fil du temps – comme des mentions de mariage, de profession religieuse ou d’autres événements marquants dans la vie de l’individu – particulièrement après 1908, quand cette pratique devient plus systématique. Ces notes sont absentes des copies civiles, bien qu’elles reprennent fidèlement le texte principal (Figure 3).

Figure 3

Exemples d’annotations marginales

Ancestry.ca, Registres de Rivière-St-Jean (St-Jean-Apôtre), 1905-1939

Les deux exemples suivants présentent des actes de baptême (Isidore Gravel en 1912 et Blanche Bond en 1918) en marge desquels se trouvent, à gauche, des notes sur le mariage des baptisés. Ces notes sont exactes (vérifiées).

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« (a épousé à Shelter Bay [Port-Cartier], Exilda Reil le 8 janv. 1945) »

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« a épousé le 23 octobre 1947 Ernest Thériault à Clarke City »

Dans les efforts de préservation des registres paroissiaux du Québec, deux grandes initiatives doivent être mentionnées : celle de l’Institut généalogique Drouin et celle de la Société généalogique de l’Utah (Mormons). Ensemble, ces deux projets ont joué un rôle essentiel dans la sauvegarde et la diffusion du patrimoine généalogique québécois, d’abord, par le microfilmage des registres (paroissiaux et civils) et, ensuite, par la diffusion des documents sous format numérique dans leur site Web respectif, Généalogie Québec [Web] ($) et FamilySearch [Web] (gratuit).

Les registres de la Côte-Nord

La constitution des registres de la Côte-Nord renvoie à une histoire assez complexe de ses populations et a suivi la présence et le déploiement du clergé sur le territoire. L’un des défis de la recherche généalogique dans notre région tient au fait, entre autres, que plusieurs de nos villages, dont Longue-Pointe, n’avaient pas de prêtre résident qui pouvait tenir registre sur place. Ce sont les prêtres missionnaires qui devaient se charger de la tenue des registres, comme l’explique le généalogiste Réal Doyle (de Havre-Saint-Pierre) dans une de ses compilations.

Les données concernant ces populations de la Côte-Nord orientale sont enregistrées surtout depuis le premier quart du XIXe siècle, mais l’absence d’un clergé résident a vu dans un premier temps l’enregistrement hors région d’actes de baptêmes, de sépultures ou de mariages. C’est ainsi qu’on retrouve de ces premiers actes touchant les premiers arrivants de toutes dénominations religieuses en Gaspésie, à Terre-Neuve ou encore à Québec. Disons aussi que les premiers prêtres pratiquant sur la côte étaient des missionnaires, donc consignaient ces actes pour les retranscrire, soit dans des registres permanents d’ailleurs, sinon dans les registres dits de missions. Par exemple dès le XVIe siècle, les registres de Tadoussac débutent, ceux des Postes du Roi et des Missions du Labrador au XVIIe siècle, et nous y retrouvons des actes pour tout le secteur de la Côte-Nord, du Saguenay-Lac-Saint-Jean et même du Labrador. Ce sont surtout les catholiques qui constituent à ce moment la majorité de ces premiers arrivants. Lorsque nous parlons de registres sur place, c’est-à-dire de façon permanente où l’on peut s’enregistrer, c’est à Hâvre-Saint-Pierre, à cette époque dit Pointe-aux-Esquimaux, en 1860, que s’ouvre le premier registre, suivi par Natashquan en 1861, village natal de Gilles Vigneault.

(DOYLE 2007 : Description de la région étudiée)

L’exemple suivant montre l’acte de baptême d’Ambroise Albert survenu en 1885 à Longue-Pointe, mais rapporté par un missionnaire dans le registre de Rivière-Pentecôte (Figure 4), ces deux villages séparés par 270 km de route.

Figure 4

Acte de baptême paspaya dans le registre de Rivière-Pentecôte

Ancestry.ca, Registre de Rivière-Pentecôte (St-Esprit), 1885

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« Le quinze novembre mil huit cent quatre vingt-cinq, nous soussigné missionnaire de St Patrick de la Pentecôte, avons baptisé sous condition, Ambroise, âgé de quatre mois, né du légitime mariage de Charles Albert, pêcheur de la Longue-Pointe de Mingan, et de Rosalie Collin; l’enfant avait été ondoyé par Edouard Boucher, du même lieu. Parrain Jean Baptiste Saincoeur; marraine Délima Vaillancourt, du même lieu; le père était absent = le parrain seul a su signer. Lecture faite. »

Les registres de la Minganie

Pour être en mesure de bien couvrir l’histoire et la généalogie de Longue-Pointe, il faut absolument comprendre l’état des registres paroissiaux en Minganie ainsi que leur dispertion dans le temps et l’espace. Réal Doyle a décrit l’état des registres en Minganie, précisant notamment les dates de début et de fin de registres (Figure 5).

Figure 5

État des registres de la Minganie

© Réal Doyle et Société de généalogie de Québec 2007

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À défaut d’un registre paroissial permanent à Longue-Pointe avant 1949 (DOYLE 2007, ORIGINIS.CA s. d.), les actes religieux paspayas étaient surtout consignés dans les registres des paroisses à proximité, dont principalement celui de Rivière-Saint-Jean. Voyons ce que disait de Longue-Pointe Hormisdas Magnan [Web] en 1925, il y a précisément un siècle.

Sainte-Anne-de-la-Longue-Pointe-de-Mingan. (B. de P. “Longue-Pointe-de-Mingan.”) Comté de Saguenay. Vicariat Apostolique du Golfe Saint-Laurent. Cette mission, fondée en 1880, a été érigée en 1898. Elle est située dans la terre ferme de Mingan, à 7 milles à l’ouest du port de mer de ce nom. Les bateaux de la Côte-Nord y font régulièrement escale en été. Ce village est doté d’un poste de signaux et d’un bureau de télégraphe à répétition. Cette mission est desservie par le missionnaire de la rivière Saint-Jean ; une chapelle y a été construite en 1902. Une longue pointe de sable, située à l’est du village, a donné son nom à la localité. Durant l’hiver, sur toute la Côte-Nord, à partir de Betsiamites, la malle est transportée sur de petits traîneaux tirés par des chiens, à raison d’un voyage tous les quinze jours, environ. Malgré quelques ponts et quelques bouts de chemins ici et là, on peut dire que les villages de la Côte-Nord sont encore privés de communications par terre. La construction d’autres ponts et d’une route carrossable reliant les principaux villages s’impose pour le développement de toute cette contrée. Pop. 310.

(MAGNAN 1925 : 216)

La relation entre Longue-Pointe et Rivière-Saint-Jean est cruciale depuis très longtemps, comme en témoignent ces extraits du Calendrier du 150e anniversaire de Longue-Pointe présentés en ordre chronologique.

Année Événement Case du Calendrier
1879La mission de LPM est desservie par les missionnaires résidant à la Pointe-aux-Esquimaux, dont l’abbé Duncan Gillis [Web].20 sept. 2000
1903Départ de Rimouski des 14 premiers pères eudistes pour la Côte-Nord. C’est le père Joseph Gallix c.j.m. [Congrégation de Jésus et Marie] qui desservira notre mission à partir de Rivière-St-Jean.26 août 2000
1928Érection d’un dispensaire à Rivière-St-Jean desservant aussi LPM et Magpie. Mlle Berthe Nadeau est la première garde-malade.20 oct. 2000
1932Plusieurs personnes de LPM travaillent sur la route reliant LPM à Rivière-St-Jean pour gagner leur droit au chômage. Un montant de 2 500 $ est alloué.31 oct. 2000
1933Au cours de l’année, on construit une route régionale à l’arrière du village. Elle reliera Rivière-St-Jean et Mingan.13 déc. 1999
1954Enfin le chaland tant attendu sur la rivière St-Jean est arrivé!28 sept. 1999
1956Le club de hockey Les Pigeons de LPM visite Les Aigles de Rivière-St-Jean et les blanchit au compte de trois à zéro. Quel match!3 mars 2000
1958Arrivée de l’abbé Marcel Breton, 1er prêtre résident du village. Comme le presbytère n’est pas prêt, il habitera, en attendant, dans la petite maison des Clarke.24 sept. 1999
1968Un magnifique pont enjambe la rivière Saint-Jean facilitant ainsi la circulation entre les villages.28 août 2000
(COMITÉ DU 150e 1999)

En plus d’être la voisine ouest de Longue-Pointe, la paroisse de Rivière-Saint-Jean a déjà constitué une frontière géopolitique d’importance.

D’un cours d’eau majestueux [rivière Magpie] à un autre, vous voici arrivé à Rivière-Saint-Jean, village qui porte le nom de cette grande rivière réputée pour ses saumons. Ce village a longtemps été la porte d’entrée de ce que l’on appelait le « Labrador maritime ». La rivière Saint-Jean a en effet servi de frontière entre les provinces de Québec et de Terre-Neuve de 1763 à 1774, et entre le Bas-Canada et Terre-Neuve entre 1809 et 1825.

(HUBERMONT 2025 : 238)

Laissons maintenant Magnan (1925) présenter la paroisse de Rivière-Saint-Jean.

Saint-Jean. (B. de P. “Rivière-Saint-Jean.”) Comté de Saguenay. Vicariat Apostolique du Golfe Saint-Laurent. Cette mission, érigée en 1905, et desservie par les Pères Eudistes, est située dans la terre ferme de Mingan, à l’est de Magpie. Les registres de cette mission s’ouvrent en 1876. C’est un poste de pêches à la morue et au saumon. Il est situé à l’embouchure de la rivière Saint-Jean, à 9 milles de Magpie et à 385 milles de Québec. La rivière Saint-Jean coule à travers les Laurentides et va se jeter dans le golfe Saint-Laurent à 70 milles en bas de la rivière Moisie. C’est une bonne rivière pour la pêche au saumon. Entre les deux estuaires de la rivière Saint-Jean et de la Petite Rivière [aujourd’hui, la rivière Saint-Cœur], se trouve un plateau de bonne terre sur lequel est bâti le village. Celui-ci doit son nom à la rivière Saint-Jean sur les bords de laquelle il est construit. Pop. 260.

(MAGNAN 1925 : 457)

Le registre de Rivière-Saint-Jean est constitué d’un ensemble de documents, de cahiers, archivés en divers lieux. Comme c’est le cas, en théorie, pour tous les registres du Québec et de la catholicité, il existe en deux copies, à savoir une copie paroissiale et une copie civile. La copie paroissiale ou religieuse est la version première du registre, celle qui a été produite par un prêtre, résident ou missionnaire, au moment des événements relatés et en présence de nos ancêtres. La copie civile, quant à elle, est une retranscription faite par le prêtre de la copie paroissiale destinée aux autorités civiles. Les deux copies sont en principe identiques, même s’il est fréquent d’y trouver de légères différences. Aujourd’hui, nous pouvons accéder à nos registres grâce à des services en ligne, gratuits ou payants, comme Ancestry, FamilySearch, MyHeritage, Généalogie Québec (de l’Institut généalogique Drouin) et le site de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ).

Le site Ancestry.ca permet contre abonnement mensuel ou annuel l’accès à la copie paroissiale microfilmée du registre de Rivière-Saint-Jean de son ouverture en 1876 à l’année 1939 (Figure 6). Cette copie est à l’origine celle de l’Institut généalogique Drouin, qui a commencé à mirofilmer les registres québécois à partir de 1938 [Web].

Figure 6

Page de présentation du registre microfilmé de Rivière-Saint-Jean

Ancestry.ca, Registre de Rivière-St-Jean (St-Jean-Apôtre), 1876-1894

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Cette page de présentation a été préparée, au moment du microfilmage en novembre 1949, par un technicien mandaté par l’Institut généalogique Drouin, organisation d’importance majeure en ce qui a trait à la généalogie québécoise. Ce microfilm est celui de la copie paroissiale du registre.

Le premier acte paspaya qu’on trouve dans le registre de Rivière-Saint-Jean est le baptême d’Olive Poulin en janvier 1876 (Figure 7).

Figure 7

Premier acte paspaya dans le registre de Rivière-Saint-Jean (1876)

Ancestry.ca, Registre de Rivière-St-Jean (St-Jean-Apôtre), 1876-1894

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« Le vingt neuf janvier, mil huit cent soixante seize, Nous missionnaire soussigné avons suppléé les cérémonies du baptême à Marie Olive née le vingt-un novembre dernier du légitime mariage de Philorome Poulin, pêcheur, et de Marguerite Jeanne Langlois, de cette mission (Longue-Pointe), et ondoyée à domicile en l’absence du missionnaire. Le parrain a été Michel Réaume pêcheur et la marraine Marie Louise Dupuis. Le père et la mère présents. Le parrain seul a signé avec nous, les autres ayant déclaréne savoir signer. Lecture faite. »

Famille Poulin-Langlois. L’enfant semble être la première du couple Philorum Poulin et Marguerite Langlois, mariés le 2 février 1875 à Moisie (St-Vital). En plus d’Olive, le couple aura Lisa qui viendra aussi au monde à Longue-Pointe (1877). Après, le couple aura des enfants ailleurs sur le territoire, dont Amable à Petit-Manitou (1881), Philippe Jean à Sheldrake (1886) et Frédéric à Rivière-aux-Graines (1895).

Michel Rhéaume, le parrain, et Marie Louise Dupuis, la marraine, forment un couple dont le mariage a été célébré le 11 janvier 1849 (Percé). Michel est originaire de Petite-Rivière, d’où provenait Thadée Leblanc et Véronique Lambert au moment de fonder Longue-Pointe (voir 2e article), alors que Marie Louise est dite de Petit-Pabos. Elle est la sœur de Léa (ou Élisabeth, née Liobé) Dupuis, deuxième épouse d’Élie Leblanc, fils de Thadée et Véronique.

Le premier mariage paspaya, toujours dans le même registre, est celui d’Hubert Gagnon et Mathilde Gravel en février 1876 (Figure 8).

Figure 8

Premier mariage paspaya dans le registre de Rivière-Saint-Jean (1876)

Ancestry.ca, Registre de Rivière-St-Jean (St-Jean-Apôtre), 1876-1894

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« Le premier février mil huit cent soixante seize vu la dispense de deux bans de mariage accordée par nous en vertu des pouvoirs reçus de Monseigneur Jean Langevin, Évêque de St Germain de Rimouski, en date du vingt septembre dernier, vu aussi la publication du troisième ban, faite à notre messe du dimanche, entre Hubert Gagnon, de cette mission (Longue-Pointe), fils de feu Joseph Gagnon et de Suzanne Debien de la Malbaie, d’une part; et Mathilde Gravel aussi de cette mission, fille mineure de Onésime Gravel, pêcheur, et de Célina Pilote de cette dite mission, d’autre part; ne s’étant découvert aucun empêchement, et du consentement des père et mère de la fille, nous missionnaire soussigné, avons reçu leur mutuel consentement de mariage et leur avons donné la bénédiction nuptiale en présence de Pierre Word, Michel Réaume et Magloire Paradis qui ont signé avec nous. Les époux ont déclaré ne savoir signer. Lecture faite. »

De façon générale, le généalogiste pourra trouver 3 « versions » distinctes d’un même acte, à savoir : 1) l’acte « initial » microfilmé dans le registre paroissial et parfois accompagné de notes en marge, 2) la copie de cet acte destinée aux archives civiles et 3) une version microfilmée à époque plus récente et fournissant une copie souvent plus lisible (Figure 9).

Figure 9

Trois versions d’un même acte

1) Ancestry.ca, Registre de Rivière-St-Jean (St-Jean-Apôtre), 1876-1894
2) FamilySearch, Registre de Rivière-Saint-Jean (Mission de Saint-Jean-Apôtre), 1882-1900
3) BAnQ, Registre de Saint-Jean-Apôtre de Rivière-Saint-Jean et Saint-Octave de Magpie, 1882-1921

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« Le trente juillet mil huit cent quatre vingt-cinq, nous soussigné, prêtre missionnaire, avons bénit la fosse de Joseph Word, décédé le premier janvier dernier âgé de onze ans et huit mois et inhumé le trois du même mois dans le cimetière de la mission de la Longue Pointe, fils légitime de Peter Ward pêcheur et de Louise Dunn de la Longue-Pointe. Étaient présents Magloire Paradis et Louise Dunn épouse de Peter Word qui n’ont pu signer. Lecture faite. Douze mots en marge bons. »

Différences entre les 3 versions. Bien qu’il s’agisse de versions très similaires, on peut tout de même noter quelques différences. Entre la 2e et la 3e version, une seule différence : la 3e version est un peu plus lisible, mais il s’agit exactement du même document. Toutefois, entre la 1re version (registre paroissial) et les deux autres (registre civil), même si elles doivent être en principe exactement les mêmes, l’œil attentif décèlera quelques différences subtiles : l’oubli de certains mots retranscrits en marge (1re) mais intégrés au texte (2e et 3e), l’identification de Longue-Pointe comme une mission dans une seule version (1re), l’ajout de la validation du prêtre des mots en marge (douze mots en marge bons) (1re). Évidemment, ces différences ne changent rien à l’information fondamentale, mais elles peuvent parfois être significatives.

Parfois, les différentes versions d’un même acte peuvent différer de façon plus importante (Figure 10).

Figure 10

Deux versions (légèrement différentes) d’un même acte

1) Ancestry.ca, Registre de Rivière-St-Jean (St-Jean-Apôtre), 1905-1939
2) BAnQ, Registre de Saint-Jean-Apôtre de Rivière-Saint-Jean et Saint-Octave de Magpie, 1882-1921

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« Le dimanche 29 de janvier 1911, nous, Curé Eudiste, soussigné avons baptisé à Ste Anne de Longue-Pointe Joseph Amédée, né le 29 de décembre 1910 du légitime mariage de William Baudry et de Marguerite Vaillancourt. Parrain, Ambroise Collin, Marraine Emilda Leblanc, qui n’ont pu signer avec nous. »

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« Le vingt-neuf de janvier mil neuf cent-onze, nous, prêtre eudiste, soussigné, avons baptisé Joseph Amédée, né le vingt-neuf de décembre mil neuf cent-dix du légitime mariage de William Baudry et de Marguerite Vaillancourt. Parrain, Ambroise Collin; Marraine, Emilia Leblanc, qui n’ont pu signer avec nous. »

Différences entre les 2 versions. Outre la différence matérielle du papier (texture, couleur, ligne rouge verticale), le texte comporte des divergences entre les deux versions. Déjà, en marge, le baptême n’est pas numéroté de la même façon (6B et 5B), Joseph et Longue-Pointe sont écrits au long dans la 2e version. De plus, on trouve le jour du baptême (dimanche) ainsi que le lieu du baptême (Ste Anne de Longue-Pointe) dans la 1re version. Deux autres différences : dans la 1re version, les dates sont écrites en chiffres, ce qui n’était pas du tout privilégié par l’Église (trop grand risque d’erreur), et la signature du prêtre diffère (prénom abrégé et présence d’un titre avant la signature). Pour l’anecdote, signalons enfin la présence du crayon du technicien responsable du microfilmage dans la 1re version.

On trouve aussi des actes importants pour Longue-Pointe dans le registre de Mingan (Notre-Dame), mais ce dernier contient essentiellement des copies de ce qu’on trouve déjà dans le registre de Rivière-Saint-Jean. Mais une consultation vaut tout de même le détour dans la mesure où on peut y trouver des actes parfois plus lisibles (Figure 11). Selon Originis.ca, le registre de Mingan s’est ouvert en 1887, mais en 1889 selon Doyle (Figure 5) et en 1905 selon Ancestry.ca.

Notre-Dame-de-Mingan. (B. de P. “Mingan.”) Comté de Saguenay. Vicariat Apostolique du Golfe Saint-Laurent. Cette mission est située sur la terre ferme de Mingan, à l’embouchure de la rivière de ce nom. Les vaisseaux qui font le service d’été entre la Côte-Nord et Québec y font escale régulièrement. C’est un des principaux centres des missions sauvages de la Côte-Nord ; il est desservi régulièrement par le missionnaire de la rivière Saint-Jean, et une fois par an, en juin, par un des missionnaires de Betsiamites, parlant la langue montagnaise. Le port de Mingan est un des plus sûrs et des meilleurs de la Côte-Nord. C’est un port à eau profonde, avec deux entrées, l’une à l’ouest et l’autre à l’est. [...] La population se compose d’une quinzaine de blancs et de 150 sauvages. Ces derniers passent l’hiver dans les bois et reviennent au commencement de l’été pour y vendre leurs fourrures. [...] Pop. 200.

(MAGNAN 1925 : 117)

Un court commentaire sur l’emploi du mot sauvage pour désigner un humain issu des Premières nations. Bien que l’emploi de ce mot soit bien sûr à proscrire aujourd’hui dans ce sens particulier, il faut comprendre qu’à époque plus ancienne, le mot renvoyait davantage au sens qu’évoque son étymologie, à savoir « qui vient de la forêt », du latin silvaticus, lui-même de silva « forêt » (même racine que les mots sylvestre, sylviculture, sylvicole, Sylvie, Sylvain, Pennsylvannie).

Figure 11

Acte de mariage dans le registre de Mingan

Ancestry.ca, Registre de Mingan (Notre-Dame), 1920

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« Le seize novembre mil neuf cent vingt, après trois publications de mariage faites à nos messes paroissiales entre Georges Maloney, fils majeur de Charles Maloney et d’Elizabeth Poirier de Mingan, d’une part; et Marie Jeanne Vibert fille majeure de Thomas Vibert et de feue Azélire Loisel, domicilée à Mingan d’autre part; ne s’étant découvert aucun empêchement, nous soussigné, missionnaire, avons reçu leur mutuel consentement de mariage et leur avons donné la bénédiction nuptiale en présence de Charles Maloney, frère du marié, et Thomas Vibert, père de la mariée, qui n’ont pu signer avec nous. »

Comme les registres ne sont pas tous disponibles et le sont de façon différente en fonction des fournisseurs (Ancestry, BAnQ, etc.), le registre de Mingan s’avère parfois utile parce qu’il présente des actes auxquels nous n’avons pas encore accès dans le registre de Rivière-Saint-Jean (Figure 12).

Figure 12

Acte dans le registre de Mingan indisponible ailleurs (pour le moment)

Ancestry.ca, Registre de Mingan (Notre-Dame), 1940

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« Le dix juillet mile neuf cent quarante vu la dispense de trois bancs accordé par le Révérend P. Clarence D’Entremont [Web] délégué spécial de son Excellence Monseigneur Alexandre Labrie vu le consentement du père de la partie mineure entre Eugène Chiasson né et domicilié en cette paroisse de Longue Pointe de Mingan fils majeur de Joachim Chiasson et de feu Anny Girard d’une part de Rita Vibert néé et domiciliéé en cette paroisse fille mineure de Walter Vibert et de Mathilda Hamilton d’autre part ne s’étant découvert aucun empêchement de mariage nous prêtre soussigné dûment delégué par le Rev P. Onésime Ouellet curé de Longue Pte avons reçu leur légitime consentement de mariage et avons donné la bénédiction nuptiale en présence de Joachim Chiasson père de l’époux qui n’a pas signé [on voit pourtant sa signature !] et de Walter Vibert père de l’épouse qui a signé avec nous ainsi que les deux époux Lecture faite 2 mots ajoutés. »

Ouvert en 1860, le registre de Havre-Saint-Pierre (alors Pointe-aux-Esquimaux) fournit aussi des actes très importants pour Longue-Pointe.

Saint-Pierre-de-la-Pointe-aux-Esquimaux. (B. de P. “Hâvre-Saint-Pierre.”) Comté de Saguenay. Vicariat Apostolique du Golfe Saint-Laurent. Les registres de cette paroisse s’ouvrent le 18 juin 1860. Le premier acte est signé par M. l’abbé F. X. Plamondon, qui s’intitule curé. La paroisse fut fondée par un groupe de familles acadiennes au printemps de 1857. Le premier missionnaire qui les visita fut le R. P. Arnauld, Oblat. Il leur dit une première messe le 29 juin 1857, jour de la fête de saint Pierre. Après la messe il fit ériger une croix sur une pointe non loin du fleuve, puis il mit la mission sous le patronage de saint Pierre, apôtre. Érection canonique : 1er octobre 1872. Le territoire de cette paroisse est compris dans les limites de la municipalité de Saint-Pierre-de-la-Pointe-aux-Esquimaux, laquelle a été érigée le 24 décembre 1872 [...]. La tradition veut qu’une tribu d’Esquimaux ait habité cette pointe autrefois ; d’où le nom de “Pointe-aux-Esquimaux”. Inutile de dire qu’il y a un grand nombre d’années qu’il n’y a plus d’Esquimaux dans cette région, si toutefois il y en a eu. A la demande des résidants le nom de “Pointe-aux-Esquimaux” vient d’être changé en celui de “Hâvre-Saint-Pierre”. Pop. 975.

(MAGNAN 1925 : 639-640)

Le premier acte paspaya à figurer dans le registre de Havre-Saint-Pierre est celui du baptême d’Hélène Leblanc, fille de Thadée et Véronique Lambert (Figure 14 du 2e article). Le deuxième acte paspaya suit immédiatement celui d’Hélène : il concerne encore une enfant de la famille Leblanc (Figure 13).

Figure 13

Deuxième acte paspaya dans le registre de Havre-Saint-Pierre (1861)

FamilySearch, Registre de Saint-Pierre-de-la-Pointe-aux-Esquimaux, 1860-1876

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« Le dix neuf août, mil huit cent soixante et un, Nous Claude Antoine Ternet, prêtre, en mission à la Longue Pointe, y avons baptisé Marie Philomène, née le huit septembre, mil huit cent-soixante du légitime mariage de Théophile Baudin, pêcheur à la Longue Pointe, et de Marie Leblanc. Parrain Honoré Kemp, marchand; marraine Véronique Lembrette. »

Note généalogique. Philomène Beaudin est la fille de Théophile et Marie Leblanc. Cette dernière est la deuxième fille de Thadée et Véronique Lambert (Figure 4 du 2e article). Marie et Théophile se sont mariés le 27 septembre 1859 à Percé. Alors que les parents de Théophile sont dits de Grande-Rivière, ceux de Marie – Thadée et Véronique – sont dits « de St. Joseph-du-Cap » [Cap-d’Espoir].

Bien qu’il soit intégré à celui de Rivière-Saint-Jean, il convient de dire quelques mots sur le registre de Magpie, et plus largement sur cette magnifique paroisse.

Saint-Octave-de-Magpie. (B. de P. “Magpie.“) Comté de Saguenay. Vicariat Apostolique du golfe Saint-Laurent. La mission de Saint-Octave-de-Magpie, desserte de Rivière Saint-Jean, est une des plus anciennes de la Côte Nord. Elle est située à l’est de la rivière Magpie, dans la terre ferme de Mingan, à 380 milles de Québec. Un missionnaire y réside depuis 1895. On y trouve une chapelle et un presbytère, ainsi qu’une population composée surtout d’Acadiens et de pêcheurs venus de la Baie-des-Chaleurs. Tous, ou à peu près, sont employés à la pêche de la morue. La localité doit son nom à la rivière Magpie, à l’embouchure de laquelle le village est construit. La rivière Magpie est un cours d’eau assez difficile à remonter, à cause des chutes et des rapides qu’on y rencontre, depuis son embouchure jusqu’à une distance d’environ 40 milles. A cette distance se rencontre un lac très profond mesurant cinquante-trois milles de longueur. D’où vient ce nom anglais de Magpie qui est le nom d’un oiseau qu’on nomme pie, en français ? Nous l’ignorons. La Commission de Géographie d’Ottawa, nous apprend que les sauvages montagnais nomment cette rivière “Moteskikan“, mot qui signifie : “abrupte“, “rocheux“, “difficile“. Pop. 200.

(MAGNAN 1925 : 602)

L’importance de Rivière-Saint-Jean, en matière de présence des prêtres, se fait en partie au détriment de Magpie et, on peut le deviner, en raison de la croissance de Longue-Pointe et Mingan, plus à l’est.

En 1912, son Excellence Monseigneur Gustave Blanche, évêque du Golfe St-Laurent, prit la décision de transférer la résidence des pères qui auparavant était Magpie, vers un poste plus centralisé, pour les missions de Longue Pointe et Mingan. Le village de Rivière St-Jean devient ce poste central. Dorénavant, le village ne sera desservi que deux fois par mois, par les prêtres de Rivière Saint-Jean. Lorsque le prêtre ne pouvait venir faire sa mission, soit pour cause de mauvaise température ou autre empêchement, dans chaque demeure, on récitait le chapelet en famille. Cette tradition sacrée, était une habitude prise par les premiers habitants, isolés sur la côte Nord, n’ayant la visite du missionnaire qu’une ou deux fois par année.

(DEROSBY ROUSSY 1983 : 69-70)

Amédée Gagnon, prêtre (1915-1996)

Réfléchir à Rivière-Saint-Jean et à ses prêtres, c’est nécessairement penser au curé Gagnon, ce prêtre excentrique de la Côte-Nord qui semble avoir laissé une très forte impression chez bien des Paspayas. Pour preuve de son excentricité et de son sens de l’humour peu commun, les nombreuses anecdotes qu’il raconte dans son ouvrage fort bien connu par les gens de la région (Figure 14).

Figure 14

Couverture du livre d’Amédée Gagnon (1992)

GAGNON, A. (1992). Curé de Rivière-Saint-Jean, octobre 1947 à août 1953, Les Éditions M. P. Vachon, 136 p.

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Fils de la Côte-Nord, Amédée Gagnon est né aux Bergeronnes en 1915 (Figure 15).

Figure 15

Acte de baptême d’Amédée Gagnon (1915)

Ancestry.ca, Registre de Grandes-Bergeronnes (Sainte-Zoé), 1915

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« Le dix octobre mil neuf cent quinze nous, prêtre, curé soussigné avons baptisé Joseph René Amédée né la veille, fils issu du légitime mariage de Omer Gagnon, forgeron et de Emma Lapointe de cette paroisse [Grandes-Bergeronnes]. Parrain: Napoléon Lapointe cultivateur oncle de l’enfant; marraine: Marie Lavoie son épouse tous deux soussignés avec nous ainsi que le père. Lecture faite. »

« [O]rdonné prêtre à Chicoutimi, par Monseigneur Georges Melançon, le 26 avril 1942 », le curé Gagnon arrive dans notre coin de pays en 1947.

Au printemps 1947, Monseigneur N.-A. Labrie m’annonce que, dans quelques mois, j’irai remplacer le curé de Rivière-Saint-Jean, Onézime Ouellet, c.j.m.. Ignorant tout de ce territoire éloigné, je réponds que je suis à sa disposition.

(GAGNON 1992 : 11)

S’il prend la cure de Rivière-Saint-Jean, une partie de son installation se fait tout de même à Longue-Pointe.

Me rends à Longue-Pointe. Mauvais cuisinier, il me fallait trouver soit une ménagère, soit un couple marié à mon service. Je trouve Théodore Leblanc et sa femme [Thérèse Vibert] avec leur jeune enfant. Un premier problème résolu. Comme il n’y avait pas de presbytère à Longue-Pointe, me devais de trouver une maison où loger et manger. On me propose la maison de Frank Vibert. La santé chancelante de sa femme [Lizzie Rail] explique le refus. Puis, c’est la visite chez Jos Ward. Ce dernier gardait ses beaux-parents [James Vibert et Marie Catherine Smith]. Après hésitation, avec l’appui de monsieur James Vibert, le père de Madame Jos Ward [Nelly née Marie Louise Vibert], on accepte de me fournir logement et nourriture. [...] Pendant tout mon séjour comme curé, l’hospitalité de cette famille fut d’une gentillesse et d’une générosité incomparable. On m’a continuellement logé, nourri et supporté gratuitement.

(GAGNON 1992 : 12-13)

Pour moi, évoquer le curé Gagnon, c’est forcément évoquer cette anecdote savoureuse qui met également en scène ma grand-mère paternelle, Mary Collin, alors jeune épouse vivant sur l’Île aux Perroquets pendant la saison estivale. Le curé Gagnon raconte l’une de ses nombreuses visites sur l’île :

En 1949, si ma mémoire est bonne [c’était en 1951], le gouvernement fédéral fit disparaître le phare et la maison et les remplaça par un phare neuf moins haut et deux maisons, une pour le gardien et l’autre pour l’assistant. Je suis allé souvent à l’île du Perroquet et en profitais pour célébrer la messe. En excursion de chasse avec Edmond Beaudin, nous arrêtons à l’île. Nous avions une trentaine de moyacs ou eiders dans ma chaloupe. Après notre arrivée, Mary part pour la chasse, une carabine 22 en main. Du haut du phare, j’ai vu sa chasse. Elle revient avec deux gibiers. De lui dire: "J’étais en haut du phare". Un peu surprise, lui ai dit qu’elle avait bien fait de prendre sa chasse dans ma chaloupe.

(GAGNON 1992 : 74)

Parce qu’elle s’est également racontée dans un livre, nous avons la chance de connaître la version de l’histoire de ma grand-mère.

Une journée de cet automne-là, l’abbé Amédée Gagnon et M. Edmond Beaudin, de Rivière-Saint-Jean, font un arrêt à l’île en revenant de leur tournée de chasse. L’abbé Gagnon, qui a béni notre mariage, vient souvent nous rendre visite. Tout plein d’humour, il aime se raconter en fumant sa pipe. Cet après-midi-là, profitant de son absence à la maison, je m’empare de ma carabine et je me dirige au bout de la pointe de l’île pensant y voir du gibier. Le tir à la carabine 22 m’est très familier. Dès l’âge de 16 ans, je chasse la perdrix et le lièvre dans les bois près de chez nous. Après mon mariage, je chasse à l’occasion des moyacs et des cacaouis du haut du cap [de l’Île] et, sans me vanter, je manque rarement mon coup. Mais cette fois-ci, en passant près de l’embarcation du père curé [Amédée Gagnon], j’aperçois sa chasse : une trentaine de moyacs étendues à l’avant. Je décide de lui jouer un tour. Je m’empare de deux moyacs. Toute heureuse de mon plan, j’arrive à la maison, je lui montre les deux moyacs en disant que ma chasse aussi a été bonne... Mais il me répond : « Tu as bien fait de prendre ta chasse dans mon canot... » Du haut de la tour, il m’avait vue et riait dans sa barbe... il m’attendait !

(COLLIN-KAVANAGH 2003 : 112)

Ce prêtre haut en couleur décède le 23 août 1996 aux Escoumins, à l’âge de 80 ans et 10 mois.

Où consulter le registre ?

Si vous avez lu jusqu’ici, au terme de cet article, c’est que vous avez un intérêt pour la généalogie paspaya et sans doute le désir de consulter par vous-même les registres de Rivière-Saint-Jean (et d’autres paroisses). Pour ce faire, il n’est plus requis de se déplacer en personne dans un centre d’archives puisque tout (ou presque) est désormais disponible en ligne, en format numérique. Dans le tableau qui suit, j’indique les principales sources qui permettent d’accéder à nos registres québécois. Chaque outil requiert un peu d’apprentissage, mais le tout s’apprend aisément. Au moment d’écrire cet article, les registres québécois sont accessibles à peu près jusqu’en 1940. Il en manque très peu. Certaines limitations légales empêchent de diffuser les actes plus récents. Cependant, des années seront ajoutées au fil du temps.

Organisme Années $ Description
Ancestry.ca
[Web]
1876-1939 (3 volumes)payantRegistres d’état civil et registres paroissiaux (Collection Drouin), Québec, Canada, 1621 à 1968
BAnQ
[Web]
1882-1919 (annuel)gratuitRegistres de l’état civil du Québec
FamilySearch
[Web]
1882-1900 (1 volume)gratuit
(avec inscription)
Canada, Québec, registres paroissiaux catholiques, 1621-1979
Généalogie Québec
[Web]
1876-1939 +++payantOutil de recherche Lafrance (banque de données).
La majorité des certificats de mariage plus récents sont accessibles.

Un nouveau livre sur la Côte-Nord

Un peu plus haut dans le texte, j’ai cité un passage d’un ouvrage sur la Côte-Nord qui vient tout juste de paraître en 2025 (Figure 16). Signé Guillaume Hubermont – Belge d’origine, chroniqueur à Radio-Canada et ancien résident de Natashquan –, ce petit guide illustré par son auteur nous « conduit de villes en villages, de Tadoussac à Kegaska. Il s’arrête ici et là pour discuter avec les Nord-Côtiers, se souvenir d’événements marquants, relever des traditions singulières et faire des recommandations culturelles, au rythme du fleuve qui s’étire et de la forêt qui devient taïga. Un guide atemporel et vivant, porté par un élan d’amour envers le territoire et les gens qui l’habitent. Une lecture parfaite pour voyager, que ce soit dans le siège passager ou votre canapé » (Les libraires 2025 [Web]).

Figure 16

Couverture du livre de Guillaume Hubermont (2025)

HUBERMONT, G. (2025). Côte-Nord. Une visite guidée sur la 138, Parfum d’encre, 351 p.

Cliquez sur l’image pour l’agrandir.

Bibliographie

BANQ (s. d.). Registres de l’état civil du Québec, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ). [Web]

COLLIN-KAVANAGH, M. (2003). Femme de gardien de phare, Kavaska, 199 p.

COMITÉ DU 150e (1999). Longue-Pointe-de-Mingan. 150 ans de labeur et de bonheur 1849-1999, calendrier commémoratif, 42 p.

DE MORANT, G. (2020). Les mormons et la généalogie. Familysearch.org : trouver ses ancêtres dans le monde, 2e édition, Archives & Culture, 80 p.

DEROSBY ROUSSY, M.-A. (1983). Magpie, petit coin ignoré de la Côte Nord, s. é., 151 p.

DOYLE, R. (2007). Répertoire des baptêmes, mariages et sépultures de la Minganie, de la Basse-Côte-Nord et du Sud du Labrador (1847-2006). T1 Baptêmes, Société de généalogie de Québec, 540 p.

FOURNIER, M. (2009). Retracez vos ancêtres. Guide pratique de généalogie, Les Éditions de l’Homme, 315 p.

GAGNON, A. (1992). Curé de Rivière-Saint-Jean, octobre 1947 à août 1953, Les Éditions M. P. Vachon, 136 p.

HUBERMONT, G. (2025). Côte-Nord. Une visite guidée sur la 138, Parfum d’encre, 351 p.

JETTÉ, R. (1991). Traité de généalogie, Presses de l’Université de Montréal, 716 p.

MAGNAN, H. (1925). Dictionnaire historique et géographique des paroisses, missions et municipalités de la province de Québec, L’Imprimerie d’Arthabaska, 738 p. [Web]

ORIGINIS.CA (s. d.). « Longue-Pointe-de-Mingan (Saint-François-d’Assise) », Originis. Baptêmes, mariages, sépultures, recensements et paroisses du Québec, originis.ca. [Web]

Merci de citer cet article si vous utilisez son contenu

Ce texte est protégé par une licence Creative Commons CC BY-NC-SA 4.0. Le citer ainsi :
KAVANAGH, É. (2025). « L’importance du registre de Rivière-Saint-Jean », Paspaya.ca, 7e article, 23 mai 2025.

Remerciements

Merci à Pierre Kavanagh pour son aide à la recherche documentaire ainsi qu’à Lucette Ward et à Claudette Beaudry pour des renseignements familiaux.

Corrections, questions et commentaires

Il est impossible de faire ce genre de travail d’analyse sans commettre erreurs et imprécisions ni sans laisser çà et là des coquilles qui échappent à l’attention, même après de nombreuses relectures. Merci de me les signaler, et n’hésitez pas à donner vos commentaires : erickavanagh99 à gmail point com.

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